La France traîne à accueillir des réfugiés de Syrie, ça rien de nouveau, on le sait déjà. Mais qu’à Paris, une agence de l’ONU mette à la porte une délégation de la révolution syrienne, on a du mal à le croire ! Et pourtant c’est vrai.
Ce vendredi 20 mars, une dizaine de militants de la Déclaration de Damas, plateforme historique de l’opposition créée en réaction à la vague de répression de 2004 en Syrie, se sont rendus au 46 rue Lauriston à Paris, siège de la Délégation pour la France du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR). Les révolutionnaires syriens entendaient rappeler à l’agence onusienne son devoir de protéger les civils, particulièrement après le nouveau massacre à l’arme chimique commis par l’armée du régime à Sermine, dans la province d’Idlib au nord-ouest du pays. Ils demandaient à être reçus par un responsable et à remettre une lettre.
La veille au soir, Place du Palais-Royal, le rassemblement syrien contre les récentes déclarations du Secrétaire d’Etat américain John Kerry qui disait vouloir «négocier» avec Bachar el-Assad avait tourné court après le refus américain de recevoir une délégation qui devait elle aussi remettre une lettre. Le HCR en revanche, c’est l’ONU, alors forcément, on pouvait s’attendre à autre chose.
Mais pour la Déclaration de Damas, pas davantage de succès. Pas d’entretien avec un responsable du HCR, ni de délivrance de lettre, envoyée finalement par courrier électronique. Auprès de l’organisme chargé par l’ONU d’aider les réfugiés, les exilés de l’enfer de Bachar ont trouvé porte close.
Que le Conseil de Sécurité de l’ONU, composé d’Etats, soit paralysé par les vetos de la Russie et de la Chine alliées de Bachar el-Assad, et peut-être aussi un peu par les atermoiements américains et britanniques – ainsi que français, malgré une rhétorique légèrement moins neutre –, on peut le concevoir. Mais en quoi des fonctionnaires des Nations Unies, ne dépendant pas des Etats mais de la seule administration du Secrétaire Général, ou dans le cas du HCR du Haut Commissaire lui-même, sont-ils ainsi astreints à ne pas recevoir un groupe politique qui demande audience et à ne pas même accepter que ses représentants lui remettent une lettre ?
Les représentants du régime syrien, seuls reconnus par l’ONU comme légitimes puisqu’étant les envoyés du gouvernement d’un Etat membre, ont toute latitude, eux, à s’exprimer au sein des forums qu’offre l’Organisation mondiale, notamment pour qualifier à tout vent de «terroristes» des révolutionnaires syriens qui restent ensuite sans réponse.
Ce alors même que le Conseil national syrien, autorité politique de transition issue de la révolution syrienne, est reconnu comme seul représentant légitime de la Syrie par trois Membres permanents du Conseil de Sécurité – Etats-Unis, Grande-Bretagne et France – et aurait donc vocation à l’être aussi par les Nations Unies, en lieu et place d’un régime génocidaire dont les organismes de Droits de l’Homme de l’ONU, parmi lesquels le HCR, n’ignorent rien des méfaits.
Éventuellement, accordons au HCR le bénéfice du doute et mettons cela sur le compte de l’indécision du moment. Mais tout de même, voir des représentants désarmés et entièrement non-violents d’une révolution populaire contre une tyrannie sanguinaire refoulés par une délégation de l’ONU, ça fait désordre, Ça fait, disons, «nouveau désordre mondial» …
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