Ghetto de Varsovie, 80 ans : «Mir zaynen do», Nous sommes là !
«Mir zaynen do», «Nous sommes là», proclame en yiddish le Partizaner Lied, le Chant des Partisans des insurgés du Ghetto de Varsovie écrit en 1943. Plus souvent, il est désigné par ses trois premiers mots, «Zog Nit Kein’Mol», «Ne dis jamais (que tu prends ton dernier chemin)». Ces paroles des combattants juifs qui, pour reprendre les mots de Jean Ferrat dans Nuit et Brouillard, «voulaient simplement ne plus vivre à genoux», ont résonné aux notes de l’accordéon ce dimanche 16 avril, Place de l’Hôtel de Ville à Paris en début d’après-midi.
Le RAAR (Réseau d’Actions Contre l’Antisémitisme et Tous les Racismes), déjà organisateur du tout premier hommage aux insurgés de Varsovie dans l’espace public le 18 avril 2021, avait rassemblé ses troupes et convié ses amis à cette cérémonie d’hommage à la poignée de braves qui, même sachant leurs propres vies perdues d’avance, s’étaient levés contre la barbarie nazie qui tenait l’Europe sous sa botte à grands renforts d’antisémitisme officiel. Son porte-parole, Albert Herzskowicz de Memorial 98 qui est une association membre du RAAR, n’a pu que rappeler combien, en France et ailleurs, les mêmes forces de la peur et de la haine de l’autre sont aujourd’hui de nouveau à l’œuvre et combien chaque acte de combat contre elles compte.
C’est aussi ce qu’a rappelé Aleksander Edelman, fils de Marek Edelman qui fut l’une des figures de proue de la résistance juive du Ghetto de Varsovie puis, après la Seconde Guerre Mondiale, un défenseur acharné de la mémoire de ses frères d’armes contre le dévoiement idéologique entrepris par le régime communiste polonais. Dans un silence comme religieux, les participants ont reçu le témoignage de celui qui n’est pas un simple «fils de», mais un authentique dépositaire et fidèle combattant de la mémoire.
On ne peut pas vivre sans mémoire. Si on vit sans mémoire, quelle que soit la mémoire, c’est comme si la civilisation revenait aux cavernes et on recommençait une nouvelle civilisation. Non. Nous avons tous une histoire, et qu’elle soit bonne ou mauvaise, il faut la connaître. Il faut la connaître, et donc, il faut la transmettre.
Aleksander Edelman.
Aux côtés de ses amis et alliés, notamment des communautés arménienne et rwandaise qui, comme le peuple juif, ne savent que trop bien ce qu’est un génocide, le RAAR a mis à profit cet hommage aux insurgés de Varsovie pour appeler encore à la résistance contre les nouvelles incarnations du racisme, de l’antisémitisme et de toutes les formes de haine qui, en ces années 20 du vingt-et-unième siècle, se montrent tout aussi menaçants que dans les années 20 du siècle passé.
L’Ukraine envahie par la Russie depuis plus d’un an était elle aussi représentée, l’Ukraine dont les troupes de Moscou déportent de force des enfants pour les faire adopter dans des familles russes et effacer en eux toute culture ukrainienne. S’il ne s’agit pas – encore – d’un génocide aussi déclaré que celui des Yézidis ou des Rohingyas, tout porte pourtant à croire que le cap est fixé.
Le message ne pouvait être plus clair et ferme : pour ces quatre-vingts ans de l’insurrection du Ghetto de Varsovie, pour toutes les résistances à la haine et à la barbarie de notre temps, «Mir zaynen do», Nous sommes là !
A voir ici : Reportage vidéo de l’événement sur la chaîne Global Suburban on YouTube.
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